Editorial Informations Ouvrières n°441
Inverser le cours des choses
Mercredi 22 février 2017
Le point de vue d’Elisabeth Narcy, membre du bureau national du POI
Inverser le cours des choses
Le point de vue d’Elisabeth Narcy, membre du bureau national du POI
La Ve République n’a jamais connu une pire campagne présidentielle. Censée faire surgir un « homme providentiel » au-dessus des partis, l’élection présidentielle fait la preuve à chaque nouvel épisode de l’impasse de ce régime, poursuit la dislocation des partis et montre que ce n’est pas cette élection qui peut répondre aux questions qui assaillent les travailleurs, l’ensemble de la population.
Pendant la crise politique, le capital maintient son objectif : continuer d’imposer ses exigences au gouvernement, au président élu, quels qu’ils soient. Cet objectif est toujours le même : la « baisse du coût du travail », c’est-à-dire le moins de limites à l’exploitation, la casse des acquis de la lutte ouvrière. C’est ce que le Livre bleu du Medef appelle « un droit social ubuesque », « une complexité érigée en système qui ferait rire si elle ne tuait pas en partie cette croissance économique tant attendue ».
« Compétitivité », « croissance économique »… ce au nom de quoi il faut licencier, supprimer des emplois, bloquer les salaires, s’acharner à la destruction de la Sécurité sociale, des retraites, de tous les acquis sociaux. Ce langage, on le connaît : c’est celui du prétendu « intérêt général » selon lequel la lutte des classes n’existerait plus. Tous les arguments sont bons : l’économie numérique transforme le travail, chacun de nous va devenir « auto-entrepreneur » selon les uns, « auto-employé » selon d’autres, avec le même résultat : plus de garanties ni de droits collectifs, chacun seul devant une entreprise qui ne s’appelle plus « employeur » mais pressure quand même le travail. Les chauffeurs Uber, gagnant au bout du compte six euros l’heure, viennent d’en faire la démonstration…
Il n’y aurait plus d’exploiteurs ni d’exploités ? Ceux qui détiennent les moyens de production auraient les mêmes intérêts que ceux qui leur vendent leur force de travail ? C’est ce que M. Gattaz et d’autres voudraient faire accroire.
Mais chaque jour les grèves, les mouvements, petits ou grands, viennent démontrer le contraire. « On ne lâche rien », disent tous ceux qui se sont battus pendant cinq mois, avec leurs organisations, contre la loi El Khomri. Elle a été imposée, mais le combat pour son abrogation est toujours d’actualité. Le 7 mars, la grève nationale des hospitaliers à l’appel de leurs fédérations syndicales unies contre la loi Touraine est rejointe par de nombreux syndicats et fédérations qui entendent défendre le service public. Et il y a, partout en France, dans les entreprises, les services publics, les établissements scolaires, des grèves, des mouvements sur telle ou telle revendication, qui obtiennent des reculs. « Il y a aussi des victoires » disait une militante POI dans un récent numéro d’Informations ouvrières.
C’est là-dessus que s’appuie la résistance concrète, quotidienne, sur l’unité et sur cette volonté de ne rien lâcher. Inverser le cours des choses ne signifie pas attendre un « grand soir », mais lutter pied à pied et faire de chaque revendication obtenue un point d’appui pour aller plus loin, avancer vers la mobilisation de millions de travailleurs avec leurs organisations qui seule peut renverser la situation.
C’est le sens de la conférence nationale, le 25 mars, des délégués des comités de liaison et d’échanges : construire ensemble la solution, trouver ensemble l’issue politique dans la résistance et l’unité ouvrières.
ici --->IO 441.pdf